Un article paru hier sur le site www.planeteanimaux.com, évoque la question du transport d’animaux de laboratoire par Air France et la manière dont celle-ci est cautionnée par le gouvernement.
Voici un extrait de la question écrite d’Alain Marleix, député UMP-Cantal, adressée le 10 juin dernier au Ministère des transports, de la mer et de la pêche :
Pour les laboratoires, l’importation d’animaux de recherche tels que les primates est de plus en plus complexe. Plus aucune compagnie dans le monde ne propose ce service (à l’exception de charters). Grâce à l’activité Cargo Air France, le territoire français présente un avantage comparatif indéniable en matière de recherche pour les grands groupes internationaux. L’arrêt du transport d’animaux pourrait mettre à mal les laboratoires et les forcer à délocaliser leurs activités à l’étranger. Il en résulterait une perte pour Air France mais aussi plus globalement pourl’économie française. […] Cependant, transporter des animaux de laboratoire nuit gravement à l’image de la compagnie et engendre d’importantes contestations dans le monde : taggages des agences et intimidations des salariés en France, bombe fictive devant les comptoirs aéroportuaires en Allemagne, campagnes publicitaires anti Air France aux États-unis, etc. Ces manifestations provoquent l’émotion des clients de la compagnie, sociétés en compte et actionnaires. Face à ces pressions, la majorité des compagnies aériennes ont déjà cessé d’assurer le transport d’animaux de laboratoire (la dernière en date est China southern en avril 2014). Aujourd’hui, les responsables d’Air France s’interrogent sur la poursuite de cette activité, et ce malgré l’engagement triple de la compagnie de maintenir l’activité et l’attractivité du territoire pour pérenniser les emplois et les infrastructures installés en France, de conserver un avantage concurrentiel par rapport aux autres transporteurs européens (Air France Cargo est l’unique avionneur européen d’animaux de recherche) et d’encourager et faciliter la recherche mondiale en proposant à ses clients (publics et privés) l’importation d’animaux de recherche dans le cadre des réglementations internationales en vigueur. […] Quelle aide le Gouvernement pourrait apporter à Air France afin d’éviter à terme des conséquences sociales et économiques liées à cette situation ?
La réponse du ministère constitue un plein soutien du transport d’animaux de laboratoire sans nuance ni prise en compte de la demande sociétale pourtant très forte en France d’une remise en question de tels transports.
Voici la réponse officielle :
Le transport par voie aérienne d’animaux vivants s’inscrit dans un cadre légal, tant international qu’européen et national, reposant sur les principes de sécurité sanitaire, de protection animale et de contrôles vétérinaires réguliers. Les animaux introduits sur le territoire européen font à ce titre l’objet d’une inspection vétérinaire systématique au poste d’inspection frontalier qui prend en compte les critères de protection animale. L’acheminement, selon ces modalités réglementées, de certains animaux d’élevage, essentiellement de primates, à des fins expérimentales contribue aux progrès de la recherche médicale et participe ainsi à la mise au point d’innovations majeures dans le domaine de la santé publique auxquelles notre pays prend donc part au tout premier rang. En dépit de ces enjeux scientifiques majeurs, la recherche internationale est actuellement confrontée aux pressions exercées, par certaines associations de défense des animaux, sur les transporteurs aériens intervenant en toute légalité dans le transport des primates importés dans le cadre de protocoles scientifiques. Des campagnes de communication ont ainsi été notamment dirigées contre la compagnie Air France qui a, d’ores et déjà, pris l’attache du Gouvernement à ce sujet. Il a été suggéré aux laboratoires et organismes de recherche touchés par cette situation de développer des actions de communication périodiques auprès du grand public, visant à rappeler le bien-fondé de la recherche scientifique et l’intérêt des avancées qui en sont attendues en termes de santé publique. Il devrait également être mis en avant les normes particulièrement rigoureuses dans lesquelles sont encadrées les procédures expérimentales qui ne sont engagées qu’après avis favorable d’un comité d’éthique. Il conviendra parallèlement que les laboratoires et organismes de recherche concernés puissent engager, en concertation avec les pouvoirs publics et les organisations représentatives des professionnels du secteur aérien, une réflexion sur les solutions de nature à pallier de manière non pénalisante une éventuelle décision commerciale d’interruption de l’activité de transport d’animaux par les transporteurs aériens assurant actuellement ce type de transports. Les pouvoirs publics pourront par ailleurs, en tant que de besoin, apporter leur soutien à la compagnie Air France en confirmant que les conditions de transport des animaux vivants satisfont à la réglementation en vigueur et en rappelant les contrôles particuliers exercés sur les protocoles scientifiques impliquant des animaux.
Cette information est importante car elle met très clairement en avant la manière dont sont perçus nos engagements par la classe politique et la manière prévue pour continuer à maitriser l’opinion publique.
Le député Alain Marleix utilise principalement un vocabulaire économique : le territoire français présente un avantage comparatif indéniable en matière de recherche pour les grands groupes internationaux (…) pérenniser les emplois (…),de conserver un avantage concurrentiel par rapport aux autres transporteurs européens
Ainsi donc les revendications sociétales d’une part grandissante de la société sur des notions telles que le bien-être animal, la pertinence des expérimentations animales, la santé publique ou la qualité de notre recherche biomédicale, qui pourtant devraient transcender l’idée du quelconque maintien de l’activité économique, sont totalement niées.
Dans les propos du député Alain Marleix comme dans ceux de la réponse du ministère concerné, nulle part n’est évoquée l’impérieuse nécessité de développer des alternatives scientifiques valables pouvant permettre à la recherche d’évoluer de manière satisfaisante, sans pour autant impliquer l’exploitation des primates. Une nécessité pourtant énoncée dans la Directive 2010/63/UE. (comme par exemple la biosimulation)
Ne sont pas évoquées non plus les remises en questions scientifiques fréquentes démontrant que la recherche animale n’est pas fiable pour l’espèce concernée, c’est à dire l’espèce humaine et que d’autres voies de recherches très pertinentes existent et qu’elles doivent être développées en extrême urgence. (lire nos article “maladies mentales : les tests menés sur des animaux sont biaisés” )
Nulle part ne sont évoquées les récentes découvertes scientifiques nous démontrant à quel point les primates sont des êtres intelligents et sensibles, fortement traumatisés par les actes de recherches. Des traumatismes qui d’ailleurs modifient les résultats d’expériences.(Pierre Jouventin, membre de Pro Anima nous en parle fréquemment)
Il est choquant de voir que seules des considérations économiques sont prises en compte et que les ONG sont diabolisées à l’excès, alors que ce débat de société est un débat d’importance, véritable enjeux de société pour des millions de citoyens français, de plus en plus relayé dans les médias. Un débat qui mérite mieux que ça !
L’énergie et la mobilisation des politiques pour soutenir le transport d’animaux destinés à des fins de recherche sont donc bien réelles alors que celles dédiées à la promotion et la mise en place d’alternatives aux expérimentations animales restent dérisoires.
Enfin la phrase suivante “développer des actions de communication périodiques auprès du grand public, visant à rappeler le bien-fondé de la recherche scientifique et l’intérêt des avancées qui en sont attendues en termes de santé publique” nous rappelle à quel point les pouvoirs publics souhaitent contrôler le débat et l’opinion avec l’aide de campagne de communication biaisées.
Nous préparons un courrier au ministère concerné ainsi qu’à Monsieur Alain Marleix.